LA VIE QUOTIDIENNE CLERMONTAISE AUX SIECLES DERNIERS

La population :

En 1698, le diocèse de Lodève comptait 26700 personnes, en 1737, 28360 habitants et en 1761, 28521 diocésains. Le gros de la population était à Lodève et Clermont. Au XVIII°, la ville se divisait en deux parties : Rougas qui correspondait au centre ancien et les nouveaux quartiers appelés Saint Paul car ils se situaient autour de l’église. Les tisserands étaient situés au Pioch dans les ruelles de la ville haute autour de Gorjan. Non loin de la mairie, rue de la poulaillerie, (1) il y avait les fabriques de chapeaux. Les tanneries se situaient rues des Calquières.

Les vêtements

Les hommes portaient des chemises de toile rousse, des vestes et des culottes de sargue (Serge) ou de cadis (étoffe de fine laine), des bas, des chapeaux de laine. Les hommes aisés portaient la perruque et des souliers à boucle.

Les femmes portaient des robes en sargue, en étamine, en burat, en serge, des jupes en cadis, serge, sargue, futaine, des cotillons (jupes du dessous) en cadis, camelot, burat et basin. Tous ces vêtements étaient en laine. Les chemisettes étaient en serge blanche ou en cadis gris, les bas en laine ou coton. Les femmes plaçaient sur leur tête un voile appelé « linceul de tête » et autour du cou par coquetterie, un mouchoir en soie ou mousseline. Les femmes âgées portaient une coiffe de gaze noire appelée « vieille » composé de la « cagnotte » qui recouvrait la tête  et d’un ruban qui se nouait sous le menton. Les femmes possédaient quelques bijoux, une alliance en or signe de mariage, ou une croix d’or. Les jeunes filles bourgeoises avaient des bijoux plus précieux.

Le mobilier :

Chaque maison possédait un ou deux grands lits avec des draps et des couvertures en laine, un berceau, une huche pour pétrir déposer le pain, une table, une armoire, des chaises, des bancs, des poteries. Les meubles étaient généralement en noyer.

Les jeux :

Au cabaret on jouait à divers jeux de cartes : la sizette (3 et 3), la quadrette et le quadrille (2 et 2), le brelan, la bête, la lansquenet, le 21… Jouer de l’argent était interdit mais ça se pratiquait beaucoup. Il y avait aussi le jeu du pile ou face, les dames, jeu de l’oie ou de 10. La pétanque existait sous le nom de jeu de boules, le jeu de mail qui se pratiquait à la Chicane, le jeu de ballon (tennis mural).

Les danses :

Elles étaient accompagnées par du violon et du tambour. Les danses avaient parfois lieu chez les particuliers ou lors des fêtes. Dans les grandes occasions, les danses publiques se faisaient autour d’un simulacre de cheval ou de poulain (2) que l’on faisait danser au son des violons. On allumait des feux de joies pour les grandes occasions. Après ces feux de joies suivait « un Te Deum » chanté à l’église.

Les enfants et le mariage :

Les enfants vouvoyaient leurs parents et leur devaient un grand respect. Les enfants pour devenir indépendants devaient être affranchis de la puissance paternelle selon un rite précis. L’enfant, tête nue, les mains jointes s’agenouillaient devant son père. Ce dernier lui donnait sa bénédiction, puis le prenait par les deux mains, les disjoignait et le faisait relever en signe de  liberté. On ne pouvait être émancipé qu’à partir de 25 ans. On recevait à ce moment la une partie de la fortune des parents de même quand on se mariait. La mariée apportait une dot.

L’éducation :

Au milieu du XVIII° la ville avait pour l’instruction des enfants à sa disposition cinq maîtres et deux maîtresses qui étaient rémunérés par la communauté et par les parents d’élèves. L’éducation était religieuse. Tout le monde n’avait pas accès à l’éducation. En 1745 seul 23 tisserands sur 76 étaient aptes à signer un registre. Les filles étaient désavantagées par rapport aux garçons dans l’accès aux études primaires

Le service du courrier au XVIII°siècle :

Dès la seconde moitié du XVII°siècle, Clermont et Lodève étaient reliés au bureau royal de la poste aux lettres de Montpellier. En 1665 furent établis deux bureaux de traverse de la messagerie, un à Lodève et l’autre à Clermont. Au milieu du XVIII° ils existaient toujours et étaient gérés par deux fabricants de draps (Fulcran Suguet à Clermont). Le messager de Lodève à Montpellier recevait chaque année 255 livres à titre de salaire dont 15 livres étaient données aux Valets de la communauté de Clermont car en hiver, le messager laissait le courrier destiné à Clermont à Saint-Felix qui se situait sur la route royale 9. Les valets venaient de Clermont récupérer le courrier et laisser en échange le courrier à envoyer. Il y avait deux liaisons par semaine. En plus des lettres, il portait des petits colis. Le courrier était ensuite distribué au bon vouloir du distributeur qui n’en faisait en général qu’a sa tête et un bon nombre de lettres et de missives n’arrivèrent jamais à leurs destinataires !! Dés 1731, les fabricants de draps envoyèrent un messager au bureau des postes de Pézenas pour récupérer leur courrier. Il était payé par la corporation des fabricants (200 livres annuelles en 1746). A partir de 1745, ce service privé sera étendu aux particuliers moyennant un petit surcoût par lettre envoyée ou reçue. Il portera dés la première année de ce service privée 473 lettres particulières en plus du courrier des fabricants. Ce fut un grand succès. Le service public avait déjà de la concurrence pour palier ses défauts.

(1) anciennement Rue des volaillers, à ce jour Rue d’Enoz (2) Cheval Bayard

 Auberges et mesures :

 Les grandes auberges appelées aussi « logis » étaient des hôtels tenus par des « hôtes majeurs » qui  offraient aux voyageurs le gîte et le couvert. Il y avait toujours dans ses auberges, des écuries. Ces auberges se situaient prés des grands axes de communication dans les faubourgs des villes. Les auberges de Clermont se nommaient « le Lion d’or » rue Frégère et le « Lion  couronné » rue du Rhonel prés des Calquières.  Il existait aussi de petites auberges appelées « cabarets » où l’on vendait surtout du vin et où l’on faisait manger les gens du peuple. L’amusement et parfois la débauche y étaient monnaies courantes. En 1750, il y  avait 18 cabarets à Clermont. C’était des gens du peuple qui tenaient ces cabarets. Les tenanciers de ces auberges devaient payer une redevance annuelle pour la vente du vin. Un morceau de buis pendu à une fenêtre indiquait le cabaret qui était souvent rudimentaire. Il existait aussi des cabarets auberges dans les campagnes prés des routes fréquentées. C’était le cas de « la baraque » sur la route de Lodève.

 LES POIDS ET MESURES

 Il y avait des poids et mesures propres à tout le diocèse et d’autres différents dans chaque ville                     

Les mesures communes à tout le diocèse :

Les longueurs : La canne de Montpellier : 1 canne équivalait  à 1 mètre 9874,

La toise (qui se divisait en 6 pieds, le pied en 12 pouces, le pouce en 12 lignes) équivalait à 1 mètre 94904.

La lieue du Languedoc équivalait à 3000 toises soit 5847 mètres.

Pour mesurer les draps, on employait « l’aune » qui équivalait à 1 m 18 cm

Les surfaces : La canne carrée valait 3 m² 9497La toise carrée : 3 m² 798744

Les poids : Le quintal (poids de comptoir ou de marchand) valait 41 kg 465. Il était divisé en 100 livres. La livre se divisait en 16 oncesOn comptait par charges de bête se somme le bois, le fumier le charbon de bois. Une charge de charbon de bois valait 3 quintaux poids de table. Les mesures variant selon des communautés.

Les mesures agraires : On utilisait  « la sétérée » pour mesurer la surface qui pouvait être ensemencée par un setier de blé. En vigne, cela correspondait à environ 1000 souches. A Clermont, une sétérée valait 24,69 ares. Ces mesures variaient quelque peu selon les communes.

Les mesures pour les grains : On utilisait « le setier » qui reprenait l’ancienne mesure romaine. Le setier de Clermont valait 65,70 litres (Lodève 60,98 litres). Le setier se divisait en deux emines et comprenait toujours 4 quartes. Les quartes de Clermont se divisaient en 4 boisseaux appelés pugnères ou mesures. La pugnère de Clermont représentait la 16° partie du setier. Comme petite mesure, on employait la dextre (156 fois ¼ plus petite que le setier). Depuis le Moyen age, le clergé possédait des mesures spéciales pour les grains. Le setier du clergé valait 66, 18 litres.

Les mesures pour le vin : Au Moyen Age, on mesurait le vin en setier. Au XVIII°, le vin vendu au clergé était toujours calculé en setiers. Il y avait une autre mesure « le Muid » de l’ancien « modius » romain qui variait selon les localités. A Clermont 1 muid valait 692 litres. Il était divisé en 12 pagelles ( 1 pagelle équivalait à 57 litres). Les pagelles étaient aussi divisées en 38 quartons à Clermont. Le Quarton valait 4 feuillettes. La feuillette valait 1,20 litre. Les grandes mesures pour le vin étaient en général en comportes cerclées. Les petites mesures étaient en étain.

Les mesures pour l’huile : L’huile se mesurait en charge. 1 charge  équivalait à 169,68 litres. La charge se divisait en 9 mesures ou orgeols. Ces mesures se divisaient en 14 quartons. 1 Quarton se composait de 4 fioles ou feuillettes. 1 fiole pesait 415 grammes. Les grandes mesures pour l’huile se faisaient en cuivre, les petites mesures en fer blanc.

Toutes ces différentes mesures entre les localités occasionnaient des problèmes lors des différentes foires et marchés. Dans certaines localités, on utilisait les mesures d’une autre commune en fonction de l’histoire de cette commune.

LES PRIX ET LES SALAIRES :

Les prix variaient beaucoup en fonction de la situation politique et économique de la région. Les prix pouvaient doubler et les denrées devenaient inaccessibles pour les gens qui devaient se priver de nourriture car leurs salaires n’augmentaient pas ou très peu.

En  1840 les fabricants de draps payaient les hommes  1 franc 50 par jour, les femmes payées 0,75 cts de francs par jour et les enfants payés 0,55 centimes de francs par jour. Les salaires étaient identiques chez tous les fabricants à cette époque

AUTRES  MESURES CLERMONTAISES:

 Superficie entre Salagou, Lergue et Dourbie (territoire Clermontais 72 Km2, soit 11,56 % du département (Beziers 97Km)

CLERMONT compte aujourd’hui 32,5 Km2  en surface et mesure  depuis le « dyke « de basalte de Roque Nègre au bord du Salagou  à Canet  13 Km en longueur, elle comptait autrefois trois  hameaux, Pradines à 5 Kms,les Bories et Fouscaïs.

Le centre exact du département de l’Hérault est à Villeneuvette cette localité était autrefois dans le territoire de CLERMONT.

Les collines du Pioch culminent à 190m, l’oppidum de la Ramasse à 257 m,le Mont Caylus (dit Ramasse) 287 m et la gare est à 97 m.

LA VIE CLERMONTAISE au  XX° Siècle

CLERMONT  depuis le Moyen Age n’avait guère évolué sur le plan géographique, toujours bridé par le cours du Rhônel. Il  l’avait franchi  avec le nouveau quartier de la Coutellerie (autrefois de la COSTELLARIE dérivé de coteau ) qui s’était constitué sous la patronage du Couvent et de l’église des Dominicains. On le franchit grâce au pont de la Coutellerie-Neuve (Rue Lamartine) qui permit de rejoindre la Route de Montpellier au carrefour de la Rue de Rougas, auparavant on le franchissait par des passerelles.

Une amorce d’extension existait avec le début de la Rue Doyen René Gosse, auparavant, Royale, puis Nationale. Le bel immeuble du tout début, à droite en descendant était la  belle auberge (du Pigeon Blanc). L’autre coté  était occupé d’abord par l’Hôtel-Dieu, Hospice et asile », puis une caserne de gendarmerie en 1831 et en 1838 s’y installa le pensionnat des Dames de la Nativité.

 La continuation de cette rue continua avec des commerces jusqu’au Boulevard Gambetta . Ensuite la création des Zones de la Madeleine  et des Tanes Basses donna à Clermont  une population supérieure à celle de Lodève, en dépassant le chiffre de 8.500 âmes.

La lecture du livre de Gaston Combarnous «  Mamette « ( 1942) nous permet de remémorer les us et coutumes de cette période prélude à un énorme bouleversement, celui de 1826 où apparut l’éclairage  à l’acétylène remplaçant  la lampe à pétrole , en 1877 puis l’éclairage urbain  au Gaz, ce n’est qu’en 1920 qu’apparut l’électricité mais il fallut attendre 1932 pour que les Bories et Pradines puissent l’obtenir.

1) Les commerçants pionniers étaient essentiellement des Aveyronnais, et encore aujourd’hui existent les descendants de ces pionniers qui furent à l’avant-garde des futurs migrants.   

Aux repas principaux, les aliments que l’on trouvait étaient le mouton, les harencades (1), , des herbes sauvages, des râpures de Roquefort. Les paysans les plus pauvres se nourrissaient de châtaignes et parfois de porc, d’haricots secs (2) Les flausonnes étaient des gâteaux à base de lait,  la Brandade de Morue , traditionnellement se mangeait le Vendredi . Le secret de la réussite c’était d’abord l’emploi de l’Huile d’Olive pour remuer la pâte de « l’Huile de coude « pour la malaxer « longuement, et de la  « beurrer » chacun à sa dose. On affectionnait le ragoût de Pois Chiches  ( Cêzês) de provenance bien particulière, soit de Lacoste, ou de Carlencas.

 LA VIE D’UNE FAMILLE QUOTIDIENNE DANS LES ANNEES 1930

Dans une rue, tout près du Rhônel une modeste famille avec 5 enfants résidait, dans un simple appartement éclairé par deux fenêtres, une sur la rue, l’autre sur le Rhonel. L’éclairage, une lampe à pétrole, accrochée au milieu de la cuisine, le chauffage était diffusé par une vaste cheminée centrale. Une crémaillère ou pendait une marmite en fonte, décrochée à mi-cuisson, elle continuait sa cuisson sur les cendres. Devant trônait un garde-feu avec une grille ou une plaque métallique. Tous les jours, deux soupes, plus un ragoût (haricots, pois chiches, lentilles,riz) Salades,poireaux, asperges de campagne (récoltés par les enfants)

Le Dimanche, dans le faitout sur un trépied chauffé sur la braise cuisait la volaille « dominicale » (dite Henri IV , v/ son souhait de la Poule au Pot le Dimanche). Chez les Espagnols, c’était l’inévitable Paella, les jours de semaine, Ragoûts d’haricots –Cocos- Lingots, (Quincarlotas à Clermont) en cassoulets, Pois Chiches, Pois cassés, petits Pois, Riz, Fèves, Lentilles Marons ou vertes, La viande était rare, côtelettes grillées sur la cendre, escalopes ou « Bif », Poules hebdomadaires achetées chez MARCORELLES, les oeufs ,surtout en omelettes avec des frites. Attenant à la cheminée un petit édifice en briques : le « potager » sorte de plan de travail sur lequel on versait dans une ouverture des braises, cendres brindilles qui tombaient dans une sorte de tiroir métallique. Sur l’ouverture on déposait la marmite, casserole en terre (claousisse) poêle (Padéna) maintenant au chaud :des soupes, ragoûts ,Tripes et Tripoux au chaud par terre.

 LE DESSERT,surtout des fruits locaux vendus par des vendeurs de rues , les bananes, oranges (rares), les fruits saisonniers :cerises, pêches, pommes, poires, figues., les jours de fêtes figuraient au menu une tarte et parfois un Mille-Feuille des gâteaux bourratifs et des flans aux œufs. Les poissonniers vendaient le Vendredi, sur le Marché mais on achetait à des pécheurs des poissons de Lergue Un de ces poissonniers ( Lou Rey – le roi) ,péchait dans la Lergue,. Il criait « AL Pei de LERGUA) « Au poisson de LERGUE. »

Une participation des enfants aux travaux agricoles était nécessaire, ramassage des sarments en automne, le débourgeonnage au printemps, l’étêtage des souches en été, la récolte des raisins de table, le triage, la mise soignée dans les corbeilles ou plateaux pour l’expédition, des raisins, Chasselas, mi Juillet , les Servents Septembre-Octobre, les vendanges s’échelonnaient sur plus d’un mois ;se terminaient par la Clairette , récoltée parfois après la rentrée scolaire le 1er Octobre, sans compter la cueillette des grappillons tardifs oubliés par des vendangeurs ( ce qui permettait aux familles pauvres de produire ,dans leur cave , des raisins foulés pieds nus,serrés dans un pressoir à main leur vin de consommation personnelle)

Les pauvres (la grande majorité de la population) allaient en période hivernale couper du bois. A VILLENEUVETTE entouré de frondaisons de tous cotés, il fallait se dissimuler des gardes forestier redoutables avec leurs jumelles, mais aussi hissés sur des plateformes de vigie.

Texte de Blaise Gallego

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